samedi 10 novembre 2012

Mignonne, allons voir si la rose...

Quand on était petits, enfin externes quoi, et qu'on ne travaillait pas bien, on nous menaçait en nous prédisant un avenir morose : vous finirez médecin généraliste dans la Creuse, on nous disait, à soigner des rhumes et des mycoses.





En dehors du fait que ce mépris pour la Creuse révélait essentiellement que nos si brillants professeurs connaissaient mal les richesses que recèle leur pays,  je ne pouvais m'empêcher, dans ces moments, de me dire que soigner les mycoses, moi, ça me plairait.


Je ne me trompais pas ; ça me plait. Ou plutôt, ça me plaît aussi. Rien de tel qu'une petite mycose pour souffler après un patient diabétique, hypertendu, bronchiteux chronique, hypertrophique de la prostate et arthrosique du genou. Et sourd aussi.

Parce que évidemment, Creuse ou pas Creuse, la médecine générale, ce n'est pas que des rhumes et des mycoses. Nos brillants professeurs, malheureusement, ne le savaient pas, puisque qu'ils ne connaissaient ni la médecine générale, ni, vraisemblablement, le goût délicieux du Creusois.




Mais passons...

Je me complais donc assez dans mon avenir morose, et, lorsque ce matin, une jeune fille vient m'expliquer que ça gratte en bas, je me réjouis de cette consultation qui s'annonce facile sinon plaisante.


En effet, rien de bien compliqué ; elle me raconte les antibio, qui ont tout déclenché, le savon qu'elle a essayé, et qui n'a pas marché, la crème qu'elle a tartinée, et qui a complété le désastre. Ca gratte, ça brûle, ça pique. Et son Mignon n'aime pas ça.


Je me dis intérieurement que Monsieur n'aime peut être pas ça, mais qu'il peut peut-être se donner un peu pour l'équipe, et faire ceinture quelques jours. Mais bon, admettons, je ne suis pas non plus conseillère conjugale.

Pendant que je mène mon petit réquisitoire personnel, elle poursuit son histoire, en me détaillant les différents ovules qu'elle a mis dans son Mignon. Là, je sursaute, et me concentre un peu plus.

A la réflexion, son Mignon, c'était peut être pas son homme, mais plutôt son vagin.
C'est mignon, d'appeler ça son Mignon.


Je ne l'avais jamais entendu, encore, celui-là. Pourtant, je commence à en avoir une petite collection, de doux synonymes pour les parties génitales féminines.
Féminines, oui ; chez les hommes, ça semble plus simple. Pour les petits garçons, Maman appelle ça le zizi, et quand ils sont assez grands pour venir en parler tout seul, c'est "au niveau de, enfin du sexe, quoi".

Moins de détour, moins de nuances, moins d'imagination, moins de poésie... Faut-il y voir dans cette bête question de langage le reflet des représentations différentes des sexes des hommes et des femmes ?

Je n'en sais rien ; mais je constate que, déjà, nommer le sexe des petites filles est un exercice de style ; sa zézette, pour les terre à terre, sa petite lune, pour les poètes, sa petite fleur, pour les romantiques... Et ça ne se simplifie pas en grandissant ; la foufoune, pour celles qui n'y vont pas par 4 chemins, l'entrejambe, pour les pudiques, l'intimité, pour les timides...

Et pour toutes, en bas. Je suis sûre de ne pas me tromper, si je dis en bas. Chacune saura que je ne désigne pas ses pieds, mais son milieu. C'est bizarre, non ? En bas, finalement, c'est plus du symbole que de la géographie. Comme la Creuse, en quelque sorte.

C'est sûr qu'anatomiquement, c'est un peu plus compliqué que chez Monsieur ; s'il dit au niveau de enfin du sexe quoi, tout le monde voit de quoi il parle. Chez Madame, c'est plus complexe ; le sexe, ça peut être dehors, ou dedans, dessus ou dessous - on comprend rapidement pourquoi ça stressait tellement Papy Freud.


Ca me plait, finalement, ces circonvolutions... Nommer sans nommer, c'est comme transmettre un secret bien gardé, confier un mystère partagé...

Et vous, vous l'appelez comment, Celui-Dont-On-Ne-Doit-Pas-Prononcer-le-Nom ?








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